Tesla : trop vert trop cher ?

Après une envolée de 500% de ses actions en 2020, le constructeur de voitures électriques Tesla a vu sa capitalisation boursière atteindre 800 milliards de dollars en début d’année 2021, une valorisation équivalente à celle cumulée des autres constructeurs automobiles.
Tesla est le reflet du vent de folie qui s’empare de certaines valeurs dites « vertes ».
Trop vert ?
Par rapport à la plupart de ses concurrents, Tesla obtient des notes plutôt satisfaisantes sur chacun des trois piliers des critères extra-financiers ESG (Environnement, Social, Gouvernance) et ce, en raison d’avantages dont il bénéficie :
- Tesla n’est pas soumis à des risques potentiels sur ses émissions de CO2 puisque la marque ne commercialise que des voitures électriques, à l’inverse de Ford qui a vu ses émissions moyennes de CO2 repasser au-dessus du seuil établi en raison de problèmes de batterie rencontrés par l'un de ses modèles.
- Compte tenu de sa récente création (2003) dans l’industrie automobile, aucun grand bouleversement n’est à envisager au sein de l’entreprise d’un point de vue social. Tesla évite ainsi le poids d’une transformation de ses usines et de la formation de ses salariés.
Aucun nuage à l’horizon dans le ciel de Tesla ?
- Il y a 18/24 mois, les véhicules produits ont connu des problèmes de qualité pendant la phase d’augmentation du volume de production, contraignant Tesla à rappeler un grand nombre de voitures présentant des défaillances. Depuis, des signes de progrès dans le contrôle qualité ont été observés… à suivre.
- Sur le plan social, un turn-over très important des salariés a été constaté en 2018 et 2019 (plaintes, licenciements) par rapport à la moyenne. Là encore, une amélioration a été remarquée depuis quelques mois.
Trop cher ?
2020, une année record pour le titre Tesla !
En 2020, après avoir cumulé des pertes durant plusieurs années, le constructeur automobile a, pour la première fois depuis sa création, franchi le seuil de rentabilité et dégagé un bénéfice net. Connu comme un « brûleur » de cash, il a généré 2,9 milliards de dollars de liquidités pour le quatrième trimestre.
Cette même année, Tesla a battu son record de production et prévoit encore 50% de croissance.
Aujourd’hui, la société représente 80% de parts de marché aux Etats-Unis (moins en Europe où le marché est plus compétitif). De plus, le prix de vente élevé des véhicules permet de générer des marges importantes.
Très logiquement, le marché a tendance à se positionner sur ce type de valeur.
Un contraste majeur entre Tesla et ses concurrents
Quand les sociétés historiques de l’industrie automobile vendent des voitures électriques, c’est autant de véhicules thermiques qu’elles ne vendent pas. En ne proposant que de l’électrique, Tesla a l’avantage de ne pas rencontrer ce problème ce qui lui donne une sérieuse avance sur ses concurrents.
Un cours de bourse qui donne le tournis
Grâce à l’envolée de son cours de bourse, Tesla a pu procéder à d’importantes levées de capitaux d’un montant de 12 milliards de dollars (l’équivalent du poids boursier de Renault). Ces fonds lui ont permis de mener à bien ses projets de développement, notamment la construction d’une usine en Chine (livraison de premiers véhicules moins d’un an après l’inauguration), et ainsi d’accroître à la fois ses ventes et ses parts de marché.
Des points d’attention en vue ?
- Les profits engrangés par Tesla en 2020 ne sont pas uniquement liés à la vente de véhicules. La société a profité du système de revente de crédits carbone pour faire des bénéfices, en revendant à des constructeurs traditionnels émetteurs de CO2 son excédent de crédits puisque non polluante.
- La concurrence s'aiguise, notamment en Chine où certains constructeurs de véhicules électriques présentent de sérieux atouts (gamme, prix) et mènent des politiques commerciales agressives.
- De nouveaux entrants arrivent sur le marché : les constructeurs traditionnels comme Daimler ou General Motors mais aussi Apple qui envisage de lancer son Apple Car dotée d’une nouvelle technologie de batterie.
- Comme de nombreux constructeurs aujourd’hui, Tesla souffre de la pénurie de semi-conducteurs et pourrait voir sa production fortement impactée au cours des prochaines années.
L’engouement des investisseurs
Dans la conjoncture économique actuelle, le gagnant emporte tout (phénomène du « The winner takes all ») et les entreprises qui prennent l’avantage sur leurs concurrents deviennent rapidement des « monopoles ». Sur le marché de l’automobile, si quelques constructeurs prenaient des parts de marchés très importantes, leur valorisation s’en trouverait favorisée.
Investir dans Tesla comporte un niveau de risque important qui a toutefois beaucoup diminué au cours des dernières années. Il y a 5 ans, un pari boursier sur Tesla avait une chance sur cent d’être gagné. Aujourd’hui, il a une chance sur dix d’être remporté en s’octroyant des parts dans un marché en très forte croissance sur lequel Tesla devance ses concurrents et pourrait donc se voir fortement valorisé.
Les marchés anticipent une formidable croissance de Tesla sur le long terme, raison pour laquelle le prix de l’action est élevé... il n’en reste pas moins que sur la base de critères « classiques » d’évaluation, l’action Tesla paraît élevée dans une optique à court-terme.