Guerre en Ukraine : ces secteurs qui tirent leur épingle du jeu

Intervention d’Olivier BADUEL, Responsable de la Gestion Actions Europe chez OFI AM, pour l'émission « Ça vaut le coup ! » sur Boursorama

Si le conflit en Ukraine secoue fortement les marchés financiers européens depuis quelques semaines, il profite aussi à quelques secteurs d’activités et principalement à ceux qui bénéficient de la hausse des prix des matières premières comme les industries pétrolières et minières. Le secteur de la défense tire également parti de la situation en raison de la très forte hausse des budgets des armées. L’Allemagne vient notamment de débloquer 100 milliards d’euros pour moderniser sa défense et s’inscrit dans une logique de réalignement de ses dépenses militaires sur 2% de son PIB par an.

Des secteurs qui ne répondent pas aux enjeux ESG…

Le « Label ISR » du gouvernement français, contrairement à ses homologues allemands et luxembourgeois, n'impose aucune exclusion sectorielle. Le secteur de la défense peut donc faire partie de l'univers d'investissement d'un fonds socialement responsable malgré les nombreuses controverses dont il fait l’objet.

Le secteur de l’armement, un sujet qui fait débat dans le cadre de la future taxonomie sociale européenne

En l'absence d'exclusions sectorielles définies dans le label gouvernemental, il est de la responsabilité de chaque société de gestion d’actifs d’établir une politique responsable concernant les « armes controversées » et de faire preuve d’un haut niveau d’exigence vis-à-vis des entreprises du secteur de la défense.
Au-delà des réglementations et des conventions nationales/internationales (mines antipersonnel, bombes à sous munitions, …), elles doivent définir avec précision une liste de types d’armes controversées visant à exclure les entreprises impliquées dans leur emploi (fabrication, acquisition, exportation, importation, …) ou à les inciter à les sortir de leurs activités. Thales s'est par exemple engagée à cesser l’utilisation du phosphore blanc au plus tard en juin 2022.

Pour préserver la paix, il faut préparer la guerre…

Jusqu’à présent, la politique de défense s’appuyait essentiellement sur la dissuasion nucléaire mais aujourd’hui, pour maintenir la paix et protéger son modèle social, l’Europe n’a pas d’autre choix que de se réarmer pour s’imposer en tant que puissance militaire, comme le montre l’exemple allemand.

… et renforcer la posture militaire de l’Europe pour dissuader une Russie conflictuelle.

Les secteurs dits « défensifs » bénéficient du contexte économique incertain

Les secteurs traditionnellement considérés comme défensifs se montrent plus résilients en cas de conjoncture économique défavorable car ils répondent à la majorité des besoins essentiels des populations. On peut citer les services aux collectivités (utilities), les télécommunications, la pharmacie, l'agroalimentaire et la distribution alimentaire.

Le secteur des utilities va bénéficier du nouveau plan « REPower EU » annoncé par la Commission Européenne qui a pour ambition d’accélérer la transition énergétique et de rendre l'Europe indépendante des combustibles fossiles russes bien avant 2030.
Sa mise en œuvre devrait profiter aux entreprises liées aux énergies renouvelables telles que l’hydrogène ou le biométhane, des secteurs dans lesquels s’illustrent deux PME françaises récemment introduites en bourse, en apportant des solutions innovantes très positives pour l’économie :

  • Waga Energy, producteur de biométhane à partir du gaz de décharges. En partenariat avec Véolia, l’entreprise vient de mettre en service de l’une des plus importantes unités de production européenne à Claye-Souilly (Seine-et-Marne).
    Par ailleurs, Veolia et TotalEnergies ont récemment signé un accord en vue de valoriser le biométhane issu d‘installations de traitement de déchets et d’eaux usées de Veolia et d’éviter les émissions de CO2.
  • Haffner Energy, production d'hydrogène à partir de biomasse par thermolyse. Ce procédé technologique particulièrement innovant contribue positivement aux enjeux climatiques puisque pour 1 kg d’hydrogène produit, 12 kgs de Co2 sont séquestrés.

Pour autant, tous ces secteurs dits « défensifs » ne vont pas résister de la même façon. Celui de la santé devrait se montrer dans son ensemble très résilient, les dépenses de santé étant peu sensibles aux aléas économiques. A l’inverse, le secteur des télécommunications va devoir démontrer sa capacité à répercuter dans ses prix la hausse du coût de l’énergie et (à venir) des salaires.

La sélection de valeurs
Un filtre ESG est bien entendu appliqué à l’ensemble des valeurs pour sélectionner celles qui appliquent les meilleures pratiques au regard des 3 piliers, E (Environnement), S (Social) et G (Gouvernance).

S’orienter vers des zones géographiques moins impactées

L’Europe, largement dépendante des combustibles russes comme le gaz, a été touchée de plein fouet par la flambée des prix des matières premières provoquée par la crise ukrainienne avec pour conséquence inévitable un ralentissement de sa croissance.

Dans cet environnement plutôt incertain, il va falloir sélectionner scrupuleusement les entreprises qui disposent d’un fort « Pricing Power » c’est-à-dire en capacité d’augmenter leurs prix pour faire face à l’augmentation des coûts, sans que cela n'affecte trop significativement la demande pour leurs produits.
D’un point de vue géographique, les entreprises exposées au marché américain devraient mieux s'en sortir, l’économie américaine étant beaucoup moins affectée, notamment du fait de son indépendance énergétique.