Est-il possible de se faire avoir par un placement faussement responsable ?

La cote grandissante de l’investissement responsable fait voir le jour à de plus en plus de Sicav et fonds commun de placement (FCP) estampillés ESG, ISR, responsables, durables, etc. Mais derrière toutes ces terminologies, les placements sont-ils conformes aux stratégies annoncées ou simplement le reflet d'un détournement marketing ?

Les investisseurs particuliers en quête de sens dans leur épargne

Démêler les vraies approches responsables des affichages superficiels et trompeurs est un enjeu sur lequel se penche l’AFG (Association Française de la Gestion financière) depuis l’origine de l’investissement responsable en France, soit une vingtaine d’années.
Initialement portée par les investisseurs institutionnels, le marché de l’ISR intéresse désormais davantage les particuliers qui souhaitent contribuer à leurs engagements de citoyens à travers leurs placements et impacter positivement la société. Et face à l’intérêt croissant de cette clientèle souvent peu experte dans le domaine, plusieurs actions ont dû être mises en place pour s’assurer de la qualité de l’information qui leur est fournie et de la cohérence avec les approches de gestion extra-financière mises en place par les gérants d’actifs.

L'AMF s'attaque au « greenwashing »

En France, le fort développement des fonds d’investissement étiquetés « responsables » ne va pas sans soulever des questions sur l’intelligibilité de la notion d’ISR pour l’investisseur, la conformité des placements par rapport aux stratégies ISR annoncées et sur les éventuels risques de « greenwashing ». Pour y répondre, des codes professionnels ont été établis dans un premier temps pour encadrer l’investissement responsable puis deux Labels publics ISR et Greenfin ont été créés afin d’offrir aux épargnants une meilleure visibilité des produits et attester de leur qualité ISR.
Enfin, l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) a mis en place une réglementation qui sera effective dès mars 2021 afin de veiller au caractère clair, exact et non trompeur de l’information communiquée aux épargnants et ainsi prévenir les risques de greenwashing.
Une première doctrine imposera aux différents fonds de démontrer une approche fondée sur un engagement significatif en respectant un certain nombre de critères encadrants, notamment une analyse extra-financière de 90% du portefeuille au minimum ou un taux de sélectivité dans les valeurs dans lesquelles le portefeuille est investi par rapport à l’univers total d’investissement (exclusion des entreprises disposant des moins bonnes notes ESG). Dès lors, les produits financiers qui souhaiteront utiliser le terme ISR comme élément central de communication devront respecter les standards précisés par cette doctrine.
En ôtant tout doute concernant l’intégrité ISR d’un produit, l’AMF encourage ainsi la finance durable toute en veillant à assurer des conditions de confiance pour l’épargnant.

Le Label ISR, un gage de qualité des processus ISR mis en œuvre par la société de gestion

Créé et soutenu en France par le ministère des Finances français, le label ISR est attribué au terme d’un processus strict de labellisation mené par des d’auditeurs indépendants qui certifient que la société de gestion répond bien au cahier des charges.
Parallèlement, la doctrine AMF englobe tous les fonds qui se réclament de l’ESG, une vision plus large qui lui permet de classer chaque produit dans une catégorie déterminée et ainsi définir une communication ciblée sur la stratégie ESG.
Ces différentes actions visent à assurer une proportionnalité entre la réalité de la prise en compte des facteurs extra-financiers dans la gestion d’un fonds et la place qui leur est réservée dans la communication faite aux investisseurs. Et déjà depuis plusieurs années, aucun fonds ne peut s’appeler ISR s’il ne répond pas aux critères exigeants de l’AMF. Il pourra cependant avoir une communication plus proportionnée s’il respecte d’autres critères moins exigeants, notamment une sélectivité moins forte.

Label ISR et doctrine AMF, deux garde-fous puissants pour rassurer la clientèle de particuliers

En France, un placement ne peut plus être faussement responsable aujourd’hui.
Le marché de l’investissement responsable s’est rapidement développé en France, stimulé par le biais de l’épargne salariale, des caisses de retraite, le fonds de réserve des retraites, etc. Le pays a toujours été en avance par rapport aux exigences ESG, contrairement à d’autres pays dont les autorités de contrôle sont moins avancées sur le sujet.
D’ailleurs, la commission Européenne tente de transposer l’expérience française au niveau européen puisque toute une réglementation européenne arrive aussi en France.
Mais les autres pays européens voudront-ils harmoniser leurs normes sur le modèle français compte tenu de la dépendance culturelle de l’ESG (beaucoup de débats autour du nucléaire) et de la politique sociale plus ou moins présente au sein des différents pays ?