Interviews de Geoffroy Lenoir, Directeur des Gestions OPC - 13 octobre 2022

Krach des marchés obligataires : comment adapter sa stratégie d’investissement

Krach des marchés obligataires : comment adapter sa stratégie d’investissement

Le recul historique des marchés obligataires, longtemps recherchés en qualité de « valeurs refuges », oblige les investisseurs à revoir leurs stratégies et leurs allocations. Comment expliquer ce nouveau marché baissier et quelles obligations privilégier : réponses de Geoffroy Lenoir, Directeur des Gestions OPC chez Ofi Invest Asset Management (ex. Aviva Investors France).

Avec la forte hausse des taux depuis le début de l’année, les investisseurs sont confrontés à un krach des marchés obligataires. L’indice Bloomberg Global Aggregate Bond, qui suit la performance des obligations d'État et d'entreprises les mieux notées (Investment Grade1), a perdu plus de 20 % en un an1. « 2022 est l’année du krach obligataire. Pour comprendre son ampleur, la comparaison est souvent faite avec des années comme 1994 ou 1999 où les marchés avaient perdu 2,5 %-3,5 %. Cette année, depuis début janvier, la baisse est souvent à deux chiffres sur les indices obligataires » prévient Geoffroy Lenoir.

Derrière le krach, les banques centrales

La raison de ce recul historique ? « L’inflation est en forte hausse depuis 2021 dans les principales zones économiques, sans perspective de baisse marquée à court terme. Autre facteur : les déséquilibres grandissants entre une offre fragilisée par d’importantes contraintes sur les chaînes d’approvisionnement et une forte demande soutenue par les politiques budgétaires des États, tout particulièrement aux États-Unis. En Europe, le conflit entre la Russie et l’Ukraine et la crise énergétique ont particulièrement nourri la hausse des prix ». Une inflation plus soutenue et plus durable qu’anticipé par les banques centrales s’est donc installée dans le paysage économique poussant les banquiers centraux à une réaction à double détente : « La Fed et la BCE ont mis fin aux rachats d’actifs, puis ont entamé une phase de normalisation des taux directeurs, mettant fin à une longue période de taux zéro voire négatifs en Europe ».

Envolée des taux longs

Les conséquences du changement drastique de politique monétaire des banques centrales se font pleinement sentir sur les marchés obligataires, très sensibles aux taux directeurs. Les cours chutent, les rendements s’envolent faisant craindre des tensions sur la dette.

« Sur les obligations à long terme, les taux d’intérêts obligataires atteignent des sommets que l’on n’avait pas vus depuis plus d’une décennie », note Geoffroy Lenoir.

Le taux du 10 ans américain est ainsi passé, de mi-octobre 2021 à début octobre 2022, d’un peu plus de 1,50 % à près de 4 %, le 10 ans français de 0,2 % à 2,9 % et le 10 ans allemand de -0,15 % à 2,30%. « La hausse est moins marquée pour les pays émergents. Leurs banques centrales avaient déjà durci leur politique monétaire dès 2021. » Deux exceptions cependant à cet état des lieux : « Le Japon et la Chine ont maintenu une politique accommodante et, pour l’instant, leurs marchés obligataires résistent à la baisse généralisée ».

Une baisse qui se prolonge

Les espoirs d’une reprise des marchés obligataires – et donc d’une baisse des taux – dépendent en grande partie de l’évolution de l’inflation et de la politique des banques centrales. Or, comme le rappelle Geoffroy Lenoir, le durcissement monétaire devrait se poursuivre : « La Fed va continuer à relever ses taux – selon nos estimations jusqu’autour de 4,75-5% début 2023 – pour apaiser les tensions inflationnistes et ne les stabilisera qu’ensuite. Du côté européen, le pic d’inflation devrait être atteint plus tard et les taux pourraient se hisser à 2,25-2,50 % voire plus haut. La politique de la BCE va devoir prendre en compte le spectre de la récession et la gestion de la flambée des prix de l’énergie sur fond de conflit avec la Russie. Mais à moyen terme, et malgré les risques de récession, les banques centrales vont tout faire pour réduire les tensions inflationnistes – cela fait partie de leur mandat ». Le recul des marchés obligataires et la hausse des taux d’intérêt devraient donc se poursuivre avec une hausse des « risques de crédit », à savoir des écartements de marges de crédit, mais aussi des répercussions sur l’épargne.

L’assurance-vie touchée mais pas coulée

Les fonds euros constitués d’obligations souveraines européennes, piliers de la plupart des contrats d’assurance-vie, sont traditionnellement parmi les premiers concernés. « Les répercussions des variations des marchés obligataires sur les contrats d’assurance-vie libellés en euro ont commencé dès le ralentissement des rachats d’actifs par les banques centrales », rappelle Geoffroy Lenoir. Pour les fonds garantis, qui offrent une garantie du capital investi, la baisse des marchés obligataires renforce la concurrence et donc le risque de décollecte.

« Le taux du livret A est passé à 2 % depuis août et pourrait encore être revu à la hausse – contre, selon la Banque de France, un rendement moyen de 1,28 % pour les fonds garantis2. Cependant, à plus long terme, les fonds garantis vont bénéficier de la remontée des taux des obligations souveraines puisqu’ils investiront dans des obligations nouvelles présentant des rendements plus élevés ». Pour soutenir les rendements de leurs fonds garantis, les gestionnaires pourraient par ailleurs être tentés de privilégier des investissements à taux variables qui bénéficient plus des hausses des rendements obligataires, plutôt que des taux fixes.

Les obligations d’entreprises, point d’entrée en vue ?

Du côté des obligations d’entreprises, ou « corporate », Geoffroy Lenoir dresse un constat plus optimiste à moyen terme. « Le marché européen des obligations d’entreprises a souffert depuis le début de l’année de la hausse des taux et de l’aversion au risque, et pourtant la situation des entreprises européennes s’est améliorée dans un environnement robuste. Il y a encore de la volatilité3 et de l’incertitude liées aux risques d’inflation et de récession, cependant le rendement moyen redevient attractif, autour de 4.5% pour les obligations « Investment Grade4 » et de 9% pour le « High Yield4 », plus risqué ». Certains secteurs s’en sortent par ailleurs mieux que d’autres : « C’est le cas des obligations émises par le secteur bancaire qui devrait profiter de la hausse des taux alors que les plus vulnérables seraient les entreprises très exposées à l’immobilier, les entreprises industrielles allemandes ou encore les sociétés sensibles à la hausse des prix du gaz. À plus long terme, les secteurs vus comme les plus polluants, comme les secteurs de l’énergie ou des matières premières, devraient être de plus en plus délaissés par une partie des investisseurs qui préféreront investir dans les entreprises œuvrant pour la transition écologique ».

Cet intérêt pour les entreprises et les secteurs vus comme plus durables est confirmé par l’engouement des investisseurs pour les obligations « vertes »5. « C’est une véritable tendance de fond, note Geoffroy Lenoir. Entre 2015 et 2021, les émissions d'obligations à taux fixe vertes, sociales et durables ont explosé, passant de moins de 30 milliards d'euros à près de 500 milliards d'euros6 ». Les banques centrales favorisent ce type d’obligations dans leurs programmes de réinvestissement, ce qui nourrit l’intérêt des émetteurs, baisse de l’obligataire ou pas ».

RÉFÉRENCES

1 Source : Bloomberg
2 Source : Banque de France, en 2021
3 La volatilité correspond au calcul des amplitudes des variations du cours d’un actif financier. Plus la volatilité est élevée, plus l’investissement sera considéré comme risqué.
4 Les obligations spéculatives à haut rendement (High Yield), ont une note de crédit (de BB+ à D selon Standard & Poor’s et Fitch) plus faible que les obligations « Investment Grade » (notées de AAA à BBB- selon Standard & Poor’s et Fitch) en raison de la santé financière plus fragile de leurs émetteurs selon les analyses des agences de notation. Elles sont donc considérées comme plus risquées par les agences de notation et offrent en contrepartie des rendements plus élevés.
5 Obligation verte (« green bond ») : tout type d’instrument obligataire structuré sur le modèle « Use of proceeds » c’est à dire dont le produit est exclusivement utilisé pour financer ou refinancer des projets identifiés ayant un bénéfice environnemental. Ces obligations sont standardisées par les « Green bonds principles » de l’ICMA et prochainement par le « European Union Green Bond Standard ».
6 Source : PwC, ESG, Transformation of the Fixed Income Market, 2022

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FA22/0228/14042023

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